Installation et maintenance d'un aquarium de type Berlinois :
De la théorie à la pratique

Christophe SOLER
Conf?rence prononcée lors des 2emes Journ?es Intern. d'Aquariophilie Marine

INTRODUCTION :
L?objectif de cette conf?rence est de vous pr?senter un exemple de r?alisation d?un aquarium r?cifal de volume moyen selon la m?thode berlinoise. Cette m?thode largement ?prouv?e est relativement simple ? mettre en ?uvre. Pourtant lorsque celle-ci est mal interpr?t?e ou mise en ?uvre, c?est l??chec assur?.

Au cours de cette conf?rence, des notions th?oriques essentielles seront d?velopp?es sans toutefois entrer dans trop de d?tails. Il est n?anmoins important de comprendre les bases physiologiques qui justifient les diff?rentes composantes de la m?thode berlinoise. L?aquariophile doit comprendre au mieux son aquarium pour l?adapter et r?agir afin de procurer une qualit? de vie optimale ? ces h?tes. Les moyens mis en ?uvre doivent permettre de r?pondre prioritairement aux besoins des invert?br?s et des poissons.

L?AQUARIUM POURQUOI FAIRE ?
Avant m?me de se lancer dans l?aventure r?cifale, une bonne d?marche est de se demander ce que l?on veut faire de son aquarium et surtout de ce qu?on veut y mettre. ? Quels sont les animaux que je veux h?berger dans mon aquarium ? ? est une question qu?il vaut mieux se poser avant de se demander ? Quel ?cumeur ou quel syst?me d??clairage vais-je acheter ? ?

Un aquarium "fish only" donc essentiellement destin? ? la maintenance de poissons r?cifaux n?aura pas les m?mes exigences en termes de maintenance qu?un aquarium destin? aux SPS (coraux durs ? petits polypes) les plus exigeants. Dans le m?me ordre d?id?e, l?aquariophile aura les pires difficult?s ? maintenir ensemble sur le long terme de d?licats Dendronephtya avec des Acropora. L?id?e g?n?rale est donc de concevoir son aquarium sur la base des besoins physiologiques des animaux qui vont y ?tres h?berg?s.

Les animaux r?cifaux ayant une capacit? d?adaptation des plus limit?e, il conviendra de porter une grande attention aux variations des param?tres physico-chimiques de leur environnement. L?hom?ostasie du milieu est une r?gle qu?il convient de respecter aussi strictement que possible lorsque l?on est responsable de la vie de ces animaux fragiles.

NOTION DE BIOTOPE
Le biotope r?cifal, sans doute le plus riche et le plus diversifi? des biotopes de la plan?te, peut lui-m?me ?tre subdivis? en plusieurs biotopes. Ainsi, les esp?ces de coraux qui prosp?rent sur la pente externe du r?cif ne sont pas les m?mes que celles qui arborent les lagons aux eaux plus calmes et ensoleill?es. Cependant, les coraux poss?dent tout de m?me une certaine capacit? d?adaptation et diverses esp?ces peuvent ainsi recouvrir plusieurs morphologies leur permettant de s?adapter ? des conditions d??clairement et de turbulences relativement diff?rentes. Ainsi, presque aucune esp?ce de corail n?est strictement inf?od?e ? un substrat ou ? un biotope sp?cifique, si bien que celles-ci peuvent se retrouver un peu partout tant que les conditions strictement n?cessaires ? leur survie sont r?unies. La bonne nouvelle pour nous aquariophiles est que globalement nous pourrons faire cohabiter ensemble une grande partie des esp?ces r?cifales dans un aquarium qui n?est qu?exceptionnellement assez volumineux pour recr?er plusieurs biotopes.

L?aquarium dont je vais vous pr?senter les caract?ristiques est essentiellement destin? ? la maintenance de coraux durs. Il est pour l?instant encore assez jeune (8 mois) donc encore relativement peu peupl? et va ?voluer vers un biotope contenant une majorit? de SPS des genres Acropora, Montipora, Pocillopora, Seriatopora, Hydnophora, Stylophora, etc?

PRINCIPALES TECHNIQUES DE MAINTENANCE DE L?AQUARIUM RECIFAL
Globalement, quatre proc?d?s originaux et significativement diff?rents les uns des autres ont ?t? imagin?s pour la maintenance des animaux r?cifaux.

La m?thode du filtre semi-humide ou sec humide selon les auteurs est encore largement utilis?e et recommand?e pour la maintenance de bacs de poissons.

La m?thode d?crite par le Dr Adey permet gr?ce ? l?utilisation d?un filtre ? algue de retirer de l?eau les d?chets azot?s et phosphor?s en ?laguant r?guli?rement les algues d?esp?ces diverses qui se d?veloppent sur un ? algal turf scrubber ?.

La m?thode du Prof Jaubert bas?e sur l?utilisation d?une cavit? (plenum) situ?e sous un lit de sable permet de maintenir correctement les param?tres physico-chimiques de l?eau dans certaines conditions de population du bac.

Enfin, la m?thode berlinoise que nous d?taillerons un peu plus ici trouve ses fondements dans un ?cumage puissant, l?utilisation de pierres vivantes et une suppl?mentation adapt?e ? la consommation des organismes r?cifaux.

LA CUVE ET LES CUVES ANNEXE

Il s?agit d?une cuve d?angle ? face bomb?e d?un volume brut de 350l, et de deux cuves annexes d?un volume utile de 70l dont 20l consacr?s ? une r?serve d?eau osmos?e. La cuve principale (aquarium de s?rie d?une grande marque) a ?t? perc?e et un syst?me de d?bordement a ?t? r?alis? afin que l?eau de surface puisse se d?verser dans un compartiment de traitement de l?eau situ? dans le meuble sous l?aquarium. Pour des raisons pratiques d?int?gration dans le meuble, la cuve de d?cantation est en fait constitu?e de deux cuves reli?es par un tuyau souple en PVC.

Pour des raisons pratiques d?int?gration dans le meuble, la cuve de d?cantation est en fait constitu?e de deux cuves reli?es par un tuyau souple en PVC. L?eau venant de la surface de l?aquarium se d?verse dans la premi?re cuve qui contient l??cumeur. L?eau passe ensuite dans la deuxi?me cuve dans laquelle se trouve la pompe de remont?e. Dans cette deuxi?me cuve sont ?galement situ?s l?arriv?e d?eau de chaux provenant du r?acteur ? calcium et un flotteur (capteur de niveau) qui en contr?le l?injection ainsi qu?un syst?me de diffusion de CO2 via un tuyau de silicone perm?able aux gaz.

LES PARAMETRES DU BIOTOPE RECIFAL

PHYSIOLOGIE DU CORAIL : BESOINS

D?un point de vue taxonomique, les coraux font partie de l?embranchement des cnidaires de la classe des Anthozoaires, sous classe des hexacoralliaires pour les coraux durs et sous classe des octocoralliaires pour les coraux mous. Ce sont des animaux coloniaux dont la plus petite entit? est constitu?e par un polype.

On distingue les coraux hermatypiques, b?tisseurs de r?cif, des coraux ahermatypiques ne construisant pas de structures calcaires.

La plupart des coraux vivent en symbiose avec des algues unicellulaires, les zooxanthelles, qui sont localis?es dans les cellules endodermiques des polypes. Ces zooxanthelles sont des dinoflagell?s appartenant au genre Symbiodinium. Elles interviennent activement dans la physiologie du corail en utilisant des m?tabolites cellulaires produits par les cellules du polype et en nourrissant le polype ? partir de produits issus de la photosynth?se. Il est maintenant scientifiquement admis que cette v?ritable symbiose entre le corail et l?algue est responsable du succ?s ?cologique des r?cifs coralliens.

- LES OCTOCORALLIAIRES : CORAUX MOUS

? part quelques spicules calcaires, cependant, n?cessaires au soutien et au maintien de la colonie, ceux-ci ne s?cr?tent pas un squelette calcaire aussi important que ne le font les coraux durs. De ce fait, la maintenance de certains param?tres physico-chimiques comme une concentration ?lev?e de l?eau en calcium (Ca2+) et en bicarbonates-carbonates (KH) sera moins drastique dans un aquarium peupl? de coraux mous que dans un aquarium peupl? de corail dur.
- LES HEXACORALLIAIRES : CORAUX DURS

? la diff?rence des coraux mous, les coraux durs s?cr?tent un squelette calcaire abondant. Ce sont les cellules ectodermiques au contact du squelette qui pr?cipitent du carbonate de calcium (CaCO3) ? partir d?ions bicarbonates (HCO3-) et d?ions calcium (Ca2+). Cette r?action est largement catalys?e en p?riode diurne par les r?actions photosynth?tiques des zooxanthelles. En effet, durant la journ?e le CO2 consomm? par les zooxanthelles favorise la pr?cipitation du carbonate de calcium selon le sch?ma suivant :

Cette ?quation (*) r?sume en fait tr?s bien les besoins de l?aquarium en termes de calcification.

On peut en d?duire que les besoins des hexacoralliaires sont des besoins en bicarbonates (HCO3-) et en calcium (Ca2+).

D?autre part, la lumi?re qui intervient dans le processus photosynth?tique de transformation du CO2 en glucose joue un r?le crucial en potentialisant la calcification. En effet, l?utilisation de CO2 dans le processus photosynth?tique permet d?acc?l?rer la r?action (*) en la d?pla?ant vers la droite.

Dans un bac essentiellement peupl? de coraux mous avec ?ventuellement quelques LPS, l?aquariophile r?cifal aura donc tout int?r?t ? maintenir un bon niveau d??clairement tant qualitatif que quantitatif. En revanche, les faibles valeurs de calcification ne n?cessitent pas dans un tel bac l?utilisation de r?acteur ? calcium ou ? calcaire, des changements d?eau partiels de l?ordre de 10 % par mois sont g?n?ralement suffisants.

Dans un bac essentiellement peupl? de coraux durs surtout des SPS, un tr?s haut niveau d??clairement doit ?tre maintenu et la diminution de la concentration en calcium et en bicarbonates doit ?tre compens? par des apports exog?nes par l?interm?diaire d?un r?acteur ? calcium ou-et ? calcaire ou via des solutions ioniques ?quilibr?es.

QUALITE DE L?EAU, COMPOSITION

L?eau est le milieu dans lequel ?voluent invert?br?s et poissons. Celle-ci doit donc r?pondre ? un certain nombre de crit?res essentiels. La nature ?tant bien faite et l??volution n?ayant rien laiss?e au hasard durant des millions d?ann?es, il est logique et prudent d?essayer de reproduire autant que possible en aquarium les caract?ristiques physico-chimiques de l?eau de mer naturelle.

La qualit? de l?eau du bac est d?pendante de plusieurs facteurs :

- Qualit? de l?eau pr?par?e au d?marrage du bac : eau de conduite, sels utilis?s.

Selon la r?gion, il est souvent n?cessaire d?utiliser de l?eau purifi?e afin de reconstituer l?eau de mer. L?utilisation d?un bon osmoseur fait souvent l?affaire et permet d??liminer un maximum de contaminants ind?sirables tels que nitrates, phosphates, silicates, mais aussi m?taux lourds, r?sidus organiques (pesticides par exemple). Les sels utilis?s pour la reconstitution de l?eau de mer doivent aussi ?tre d?excellente qualit?.

- Maintien des qualit?s de l?eau.

En milieu clos, la qualit? de l?eau a vite fait de s?alt?rer au cours du temps. M?me si bien malin est celui qui pourra se vanter de maintenir constante la composition chimique de l?eau, il est imp?ratif de tout mettre en ?uvre pour stabiliser au mieux un maximum de param?tres. Tous les param?tres ne sont pas ma?trisables, on ne les conna?t d?ailleurs pas tous, mais les plus importants le sont.

Parmi les param?tres qui ?voluent on distingue :
- La temp?rature
- La densit?
- Le pH
- Des esp?ces ioniques dont la concentration diminue : Ca2+, HCO3-, CO3--, Sr2+, I-
- Des substances inorganiques qui s?accumulent (NO3-, HPO42-)

- Temp?rature

La temp?rature peut ?tre facilement maintenu constante ? l?aide d?une r?sistance thermostat?e. Certains auteurs recommandent des temp?ratures relativement basses de l?ordre de 24?C alors que d?autres pr?conisent plut?t 27?C. En fait, tout est possible si l?on reste dans une fourchette raisonnable (24-28?C). La temp?rature moyenne sur les r?cifs coralliens est de l?ordre de 27?C, il semble donc logique d?utiliser cette temp?rature pour maintenir nos mini-r?cifs. Une temp?rature aussi basse que 24?C est une s?curit? dans le sens o? le m?tabolisme est diminu?. Ainsi, explosions d?algues et maladies ?ventuelles se d?veloppent moins rapidement ? cette temp?rature laissant le temps ? l?aquariophile pour r?agir, mais le revers de la m?daille est que les coraux poussent aussi moins vite. ? 27?C, le m?tabolisme est plus ?lev? et vos coraux se d?velopperont plus rapidement, mais attention aux algues si la qualit? de l?eau n?est pas excellente ou si votre population d?herbivores est trop l?g?re.

Si la pi?ce dans laquelle se situe l?aquarium est bien chauff?e l?hiver, il n?est pas toujours n?cessaire d?utiliser une r?sistance chauffante, le d?gagement calorifique des pompes et de l??clairage peut largement suffire. De plus une petite fluctuation nocturne de l?ordre, de un ? deux degr?s n?est pas n?faste ? l?aquarium. C?est l??t? que le probl?me de la temp?rature est souvent le plus aigu. Selon la temp?rature de votre pi?ce, l??quipement de l?aquarium (pompes, ?clairage, galerie ouverte ou ferm?e), il conviendra de refroidir l?eau du bac de fa?on ? ce que la temp?rature ne d?passe pas si possible les 28?C. Diverses possibilit?s s?offrent ? vous. Un simple ventilateur soufflant vers la surface du bac ou/et vers la d?cantation suffit souvent en favorisant l??vaporation ? faire chuter l?eau du bac de 2 ? 3?C. Quelquefois l?utilisation d?un climatiseur peut s?av?rer n?cessaire. Climatiser la pi?ce peut apporter ? la fois un confort aux poissons, invert?br?s mais aussi ? l?aquariophile. Si cette solution s?av?re trop on?reuse refroidir directement l?eau du bac ? l?aide d?un refroidisseur d?eau est la derni?re solution qui s?offre ? vous. Sachez qu?au-del? d?un certain volume d?eau ? refroidir, le prix du refroidisseur peut vite atteindre ou d?passer celui d?un climatiseur d?appartement.

- Densit?

Elle se mesure en g?n?ral simplement ? l?aide d?un densim?tre (attention aux densim?tres aquariophiles qui peuvent ?tre tr?s impr?cis) ou d?un r?fractom?tre.
Celle-ci doit ?tre maintenu ? une valeur acceptable (entre 1020 et 1025) lors de la mise en eau du bac et lors des changements d?eau. L??vaporation doit ?tre compens? par des ajouts d?eau douce (osmos?e de pr?f?rence), ou soit totalement soit partiellement par des ajouts d?eau de chaux. Id?alement, un syst?me de remplissage automatique (osmolateur ou autre) permet de compenser de fa?on r?guli?re cette ?vaporation et de limiter ainsi les ?carts de densit?.

- pH

L?eau de mer naturelle a un pH moyen d?environ 8,08. L?eau de mer est tamponn?e gr?ce au syst?me des carbonates-bicarbonates-CO2 ce qui signifie que tout apport endog?ne ou exog?ne de substances acides ou de substances basiques sera neutralis? par ce syst?me tampon selon l??quilibre suivant :

CO2 + H2O ‹—› HCO3- + H+ ‹—› CO32- + 2H+

En aquarium, milieu clos, le pH fluctue entre le jour et la nuit en raison des processus photosynth?tiques qui s?y d?roulent. Le CO2 est utilis? le jour par les algues, dont les zooxanthelles, ce qui provoque une hausse du pH. La nuit, ce m?me CO2 n?est plus utilis? par la photosynth?se et son accumulation est la cause d?une baisse du pH. En moyenne les valeurs de pH oscillent souvent entre 7,8 et 8,3 avec une tendance nette ? l?acidification. Cependant d?un aquarium ? un autre l?amplitude de ces oscillations peut ?tre plus ou moins grande avec des pH moyens plus ou moins ?lev?s. Par exemple un aquarium mal brass?, sans ?cumeur pourra difficilement ?vacuer le CO2 en exc?s au cours de la p?riode nocturne. Dans un tel aquarium, le pH peut baisser anormalement la nuit. A l?inverse, d?autres aquariums ayant recours ? l?injection d?eau de chaux peuvent au contraire voir le pH s??lever au-dessus de 8,5 en fin de journ?e.

Ce param?tre est particuli?rement important en aquariophilie r?cifale. Avec la concentration en C inorganique (CO32-/HCO3-/CO2), le pH est un param?tre crucial de la calcification et de la photosynth?se. Dans mon bac, le maintien d?une fourchette de pH optimal ? la calcification est assur? par l?apport d?eau de chaux via un r?acteur ? calcium maison et une injection de CO2 via un tuyau de silicone perm?able aux gaz. L?injection de CO2 a ?t? envisag?e car j?ai pu constater que le pH en fin de journ?e pouvait all?grement d?passer les 8,4 voire 8,5.

Ceci est d? ? l?injection d?eau de chaux et ? une intense activit? photosynth?tique dans la journ?e. La consommation du CO2 qui en r?sulte n?est visiblement pas assez rapidement compens?e par une dissolution du CO2 atmosph?rique malgr? un brassage et un ?cumage efficient, ce qui entra?ne cette ?l?vation du pH. Il n?est pas inutile de rappeler que le pH moyen de l?eau de mer naturelle est de 8,08 et que la concentration de HCO3- utile ? la calcification et ? la photosynth?se est maximale autour d?un pH de 7,8. Un pH trop ?lev? pendant plusieurs heures n?est donc pas particuli?rement souhaitable, l?id?al ?tant de maintenir un pH autour de 8,1.

- Esp?ces ioniques dont la concentration diminue : Ca2+, HCO3-, CO32-, Sr2+, I-

Comme dans le cas du pH, les variations de concentration de ces esp?ces ioniques peuvent grandement fluctuer d?un aquarium ? un autre. Un aquarium r?cifal richement peupl? de SPS verra sa concentration calcique, sa duret? carbonat?e (CO32-/HCO3-) et son taux de strontium (Sr2+) baisser rapidement si rien n?est fait pour compenser la consommation due ? la calcification. Ce n?est pas le cas dans un aquarium de poissons ou de coraux mous.

L?utilisation d?un r?acteur ? calcium maison pour compenser totalement l??vaporation du bac est la solution qui a ici ?t? adopt?e. Les raisons sont multiples :
- Un niveau d??vaporation ?lev? de l?ordre de 4-5 litres par jour soit plus de 1 % du volume brut des cuves.
- La pr?cipitation des phosphates engendr?e par l?eau de chaux.
- L?apport de calcium tout en maintenant un pH ?lev? (par apport d?OH-).
- La r?g?n?ration de la r?serve alcaline, en particulier de la duret? carbonat?e.
- La simplicit? d?utilisation.

Cependant, l?utilisation de ce r?acteur ? calcium, conjointement ? un ?clairage puissant engendre des hausses de pH en fin de journ?e jusqu'? des valeurs aussi hautes que 8,5. Des valeurs de pH aussi ?lev?es ne sont pas souhaitables ? cause des processus de pr?cipitation carbonato-calciques qu?elles peuvent engendrer, ainsi que du d?ficit en CO2 dissout qui en r?sulte, sans compter le stress que cela peut ?ventuellement occasionner sur certains invert?br?s et poissons. De plus, la duret? carbonat?e ne d?passait pas les 5?KH et pouvait descendre encore plus bas.

J?ai donc envisag? de compenser la consommation trop ?lev?e de CO2 dissous, en dissolvant directement dans l?eau du CO2. Le syst?me se compose d?une bonbonne de CO2 de 350g munie d?un d?tendeur, d?un compte bulle et d?un tuyau silicone perm?able aux gaz. Ce tuyau silicone ferm? ? l?une des extr?mit?s est enroul? autour d?un manchon de PVC annel? et plong? dans la deuxi?me cuve de d?cantation sous l?arriv?e d?eau de chaux et pr?s de la pompe de remont?e. Ainsi le CO2 est directement dissous dans l?eau dans une zone bien brass?e o? l?eau de chaux lorsqu?elle est inject?e peut consommer le CO2 pour r?g?n?rer des HCO3-.

Une injection continue (9 bulles par minutes) permet de stabiliser le pH ? 7,85 le matin (avant allumage des lampes) et 8,30 le soir (avant extinction des lampes).
Cette injection de CO2 pourra ? terme ?tre r?gul? avec un pH-m?tre ?lectronique coupl? ? une ?lectrovanne. Le pH-m?tre d?clenchera l?ouverture de l??lectrovanne et donc l?injection de CO2 lorsque la valeur de pH d?passera 8,2.

La suppl?mentation en Sr2+ et en I- est assur?e par un apport hebdomadaire de SrCl2 et de KI en solution. Enfin, un changement d?eau d?environ 10l par quinzaine est effectu? pour diminuer les risques de carences.

- Des substances inorganiques qui s?accumulent (NO3-, HPO42-)

Le m?tabolisme des animaux g?n?re divers d?chets azot?s et phosphor?s qui aboutissent via les cycles de l?azote et du phosphore aux nitrates et aux phosphates (respectivement NO3-, HPO42-). L?accumulation de ces d?chets doit ? tout pris ?tre limit? au maximum. Les phosphates sont connus pour ?tre des inhibiteurs de la calcification et favorisent la croissance des algues ind?sirables. Les nitrates semblent moins toxiques pour les invert?br?s en dessous de valeurs moyennes (50 mg/l) d?j? trop ?lev?es mais favorisent ?galement la pousse d?algues ind?sirables. D?une mani?re g?n?rale, un taux de nitrates inf?rieur ? 10 mg/l est recommand? et il est relativement ais? d?obtenir des taux encore plus bas dans un aquarium berlinois bien con?u. En particulier, les quantit?s de pierres vivantes et de sable doivent ainsi ?tre suffisamment importantes pour g?n?rer des zones ana?robies n?cessaires au d?veloppement de populations de bact?ries d?nitrifiantes. Il n?est cependant pas absolument n?cessaire de rechercher ? tout prix une concentration nulle en nitrate, une faible concentration (5-10 mg/l) contribue m?me ? ??booster?? la croissance de certains invert?br?s. En ce qui concerne les phosphates, le sujet est plus d?licat ?tant donn? la tr?s mauvaise fiabilit? des tests aquariophiles pour ce param?tre. D?une mani?re g?n?rale, les tests aquariophiles ne devraient pas d?tecter de phosphates dans l?eau de l?aquarium. L??quilibre biologique institu? dans l?aquarium (bact?ries nitrifiantes, d?nitrifiantes, etc?) doit permettre de maintenir ces ions ? des concentrations acceptables. L?institution d?un tel ?quilibre est aid?e par un certain nombre d?outils dont l??cumeur constitue l?un des piliers. En effet, un ?cumage efficace permet de soustraire des cycles de l?azote et du phosphore un certain nombre de mol?cules avant que celles-ci ne soient transform?es. Cela permet donc de minimiser l?accumulation de nitrates et de phosphates en bout de cycle. Les nitrates sont ensuite pris en charge par les bact?ries d?nitrifiantes qui colonisent les zones ana?robies du substrat (pierres vivantes et sable) et sont transform?s en azote gazeux inoffensif. Les phosphates sont moins facilement ?limin?s et pr?cipitent dans l?aquarium sous forme de phosphates de calcium et de magn?sium. Un apport d?eau de chaux aide ? la pr?cipitation de ces phosphates inorganiques.

FLUX LUMINEUX : ENERGIE, PHOTOSYNTHESE

Les organismes r?cifaux ont su s?adapter au cours de l??volution ? la relative pauvret? de l?eau dans laquelle baignent les r?cifs coralliens. La symbiose entre le corail et une algue unicellulaire (zooxanthelle) en est la parfaite illustration. Le corail peut ainsi profiter des produits de la photosynth?se g?n?r?s par l?algue tout en faisant b?n?ficier ? celle-ci d?un support de choix ainsi que de d?chets m?taboliques azot?s et phosphor?s. Le corail tire ainsi partie de la source de carbone organique synth?tis?e par l?algue, ce m?me carbone organique faisant cruellement d?faut dans l?eau de mer (voir aussi le sch?ma dans le paragraphe sur la physiologie du corail).

En cons?quence pour nous aquariophiles, ?tant donn? que la plupart des organismes r?cifaux sont d?pendants de la lumi?re, le choix de la source d??clairage est de premi?re importance. Tant sur le plan qualitatif que quantitatif, il est imp?ratif d?assurer aux zooxanthelles un apport lumineux substantiel.

Les param?tres d?terminants de la source d??clairage sont spectre et puissance. J?ai personnellement opt? pour une source aux halog?nures m?talliques dans un projecteur grand angle contenant deux ampoules, l?une de 400W (10000 Kelvin) et l?une de 70W (20000 Kelvin). La puissance ainsi d?velopp?e (1,35 W/l brut) et le rendu esth?tique d? ? la combinaison des ampoules 10000 et 20000 Kelvin satisfont aux besoins des invert?br?s les plus exigeants et aux imp?ratifs d?esth?tisme de la r?alisation. Cette lampe a ?t? install?e environ 3 semaines apr?s la mise en eau et l?installation des pierres vivantes dans l?aquarium afin de limiter au maximum la croissance des algues durant la phase de d?marrage. L??cumeur fonctionnant ? plein r?gime depuis le d?but a permis d??viter au maximum une accumulation de nutriments pendant la phase de maturation, nutriments qui associ?s ? un ?clairage intense auraient probablement engendr? une explosion d?algues.

HYDRODYNAMISME, BRASSAGE

Le brassage est souvent n?glig? par les aquariophiles. Pourtant, il constitue sans nul doute l?une des cl?s du succ?s de l?aquarium r?cifal. Il suffit de plonger quelque temps au-dessus d?un r?cif pour se rendre compte de l?importance de l?hydrodynamisme. Les courants caressent quelquefois violemment les coraux et permettent leur oxyg?nation, les d?barrassent de leurs d?chets et leur apportent des proies planctoniques. Cet ?tat de fait implique un brassage de bon niveau tant qualitatif que quantitatif dans l?aquarium r?cifal. Sur le plan qualitatif, il convient d??viter les courants lin?aires cisaillants et de g?n?rer au contraire des courants multidirectionnels, al?atoires, tourbillonnants. Sur le plan quantitatif, il faut s?assurer de fournir une puissance suffisante souvent ?valu?e selon le nombre de pompes et le d?bit de celles-ci.

?videmment, il faut nuancer ce brassage en fonction de la nature des coraux h?berg?s. Globalement et malgr? quelques exceptions, les coraux mous et les LPS ne supportent pas un brassage trop violent qui risquerait de d?chirer leurs polypes, alors que les SPS n?cessitent un brassage plut?t vigoureux pour extraire l??norme quantit? de mucus que ceux-ci s?cr?tent.

Dans l?aquarium pr?sent? ici, le brassage est assur? par deux pompes ?lectroniques ? d?bit variable de 700 ? 4000 l/h avec une fr?quence de pulsation r?glable de 1 ? 6 secondes ce qui permet de g?n?rer un brassage vigoureux et al?atoire. L?intensit? du brassage est diminu?e la nuit gr?ce ? un syst?me r?gul? par des cellules photo?lectriques.

POPULATION, CROISSANCE DES INVERTEBRES ET DES POISSONS
Au jour de l??criture de ce texte (f?vrier 2001), la population de l?aquarium se compose d?anthozoaires appartenant ? diff?rents genres : Acropora, Stylophora, Montipora, Hydnophora, Porites, Plerogyra, Euphyllia, Turbinaria, Favia, Lithophyton, Lobophyton, Condylactis, Zoanthus, Bartholomea et quelques Aiptasia. Les poissons pr?sents sont un banc de dix Chromis viridis, un Paracanthurus hepatus, un Ctenochaetus strigosus, un Pseudochromis flavivertex, un couple d?Amblyeleotris yano?. Enfin, un Tridacna squamosa, une Holothurie Edulis, quelque Bernard l?hermites, des ascidies, des vers tubicoles et une microfaune abondante habitent ce mini-r?cif.

Depuis l?installation des premiers animaux soit 2 mois apr?s la mise en eau, les taux de croissance observ?s sont de l?ordre du centim?tre par mois pour les Acropora, Montipora et Hydnophora. Les poissons ne sont pas en reste, car bien nourris leur croissance est encourageante. Mis ? part la disparition d?un Chromis et d?une crevette Periclimenes brevicarpalis qui logeait dans l?an?mone Condylactis, aucune autre perte n?est a d?plor? ? ce jour.

Affaire ? suivre ?


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